Πανσέληνος-Pleine lune, poesie francaise (2015)
Posted on 30 Ιουλ, 2015 in Ποιηση | 0 comments
LUNE-Poesie francaise
1.-Tristesses de la lune (Charles Baudelaire, 1821-1867)
“Ce soir, la lune rêve avec plus de paresse;
Ainsi qu’une beauté, sur de nombreux coussins,
Qui d’une main distraite et légère caresse
Avant de s’endormir le contour de ses seins,
Sur le dos satiné des molles avalanches,
Mourante, elle se livre aux longues pâmoisons,
Et promène ses yeux sur les visions blanches
Qui montent dans l’azur comme des floraisons.
Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poète pieux, ennemi du sommeil,
Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d’opale,
Et la met dans son coeur loin des yeux du soleil”
2.- La lune (Theophile Gautier, 1811-1872)
“Le soleil dit à la lune:
” Que fais-tu sur l’horizon?
Il est bien tard, à la brune,
Pour sortir de sa maison.
L’honnête femme, à cette heure,
Défile son chapelet,
Couche son enfant qui pleure,
Et met la barre au volet.
Le follet court sur la dune;
Gitanas, chauves-souris,
Rôdent en cherchant fortune;
Noirs ou blancs, tous chats sont gris.
Des planètes équivoques
Et des astres libertins,
Croyant que tu les provoques,
Suivront tes pas clandestins.
La nuit, dehors on s’enrhume.
Vas-tu prendre encor ce soir
Le brouillard pour lit de plume
Et l’eau du lac pour miroir?
Réponds-moi. – J’ai cent retraites
Sur la terre et dans les cieux,
Monsieur mon frère; et vous êtes
Un astre bien curieux !”
3.- Clair de lune (Paul Verlaine, 1844-1896)
“Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.
Tout en chantant sur le mode mineur
L’amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n’ont pas l’air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,
Au calme clair de lune triste et beau,
Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
Et sangloter d’extase les jets d’eau,
Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres”
4.- Ballade à la lune (Alfred de Musset, 1810-1857)
“C’était, dans la nuit brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.
Lune, quel esprit sombre
Promène au bout d’un fil,
Dans l’ombre,
Ta face et ton profil ?
Es-tu l’oeil du ciel borgne ?
Quel chérubin cafard
Nous lorgne
Sous ton masque blafard ?
N’es-tu rien qu’une boule,
Qu’un grand faucheux bien gras
Qui roule
Sans pattes et sans bras ?
Es-tu, je t’en soupçonne,
Le vieux cadran de fer
Qui sonne
L’heure aux damnés d’enfer ?
Sur ton front qui voyage.
Ce soir ont-ils compté
Quel âge
A leur éternité ?
Est-ce un ver qui te ronge
Quand ton disque noirci
S’allonge
En croissant rétréci ?
Qui t’avait éborgnée,
L’autre nuit ? T’étais-tu
Cognée
A quelque arbre pointu ?
Car tu vins, pâle et morne
Coller sur mes carreaux
Ta corne
À travers les barreaux.
Va, lune moribonde,
Le beau corps de Phébé
La blonde
Dans la mer est tombé.
Tu n’en es que la face
Et déjà, tout ridé,
S’efface
Ton front dépossédé.
Rends-nous la chasseresse,
Blanche, au sein virginal,
Qui presse
Quelque cerf matinal !
Oh ! sous le vert platane
Sous les frais coudriers,
Diane,
Et ses grands lévriers !
Le chevreau noir qui doute,
Pendu sur un rocher,
L’écoute,
L’écoute s’approcher.
Et, suivant leurs curées,
Par les vaux, par les blés,
Les prées,
Ses chiens s’en sont allés.
Oh ! le soir, dans la brise,
Phoebé, soeur d’Apollo,
Surprise
A l’ombre, un pied dans l’eau !
Phoebé qui, la nuit close,
Aux lèvres d’un berger
Se pose,
Comme un oiseau léger.
Lune, en notre mémoire,
De tes belles amours
L’histoire
T’embellira toujours.
Et toujours rajeunie,
Tu seras du passant
Bénie,
Pleine lune ou croissant.
T’aimera le vieux pâtre,
Seul, tandis qu’à ton front
D’albâtre
Ses dogues aboieront.
T’aimera le pilote
Dans son grand bâtiment,
Qui flotte,
Sous le clair firmament !
Et la fillette preste
Qui passe le buisson,
Pied leste,
En chantant sa chanson.
Comme un ours à la chaîne,
Toujours sous tes yeux bleus
Se traîne
L’océan montueux.
Et qu’il vente ou qu’il neige
Moi-même, chaque soir,
Que fais-je,
Venant ici m’asseoir ?
Je viens voir à la brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.
Peut-être quand déchante
Quelque pauvre mari,
Méchante,
De loin tu lui souris.
Dans sa douleur amère,
Quand au gendre béni
La mère
Livre la clef du nid,
Le pied dans sa pantoufle,
Voilà l’époux tout prêt
Qui souffle
Le bougeoir indiscret.
Au pudique hyménée
La vierge qui se croit
Menée,
Grelotte en son lit froid,
Mais monsieur tout en flamme
Commence à rudoyer
Madame,
Qui commence à crier.
” Ouf ! dit-il, je travaille,
Ma bonne, et ne fais rien
Qui vaille;
Tu ne te tiens pas bien. ”
Et vite il se dépêche.
Mais quel démon caché
L’empêche
De commettre un péché ?
” Ah ! dit-il, prenons garde.
Quel témoin curieux
Regarde
Avec ces deux grands yeux ? ”
Et c’est, dans la nuit brune,
Sur son clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.”
5.- Clair de lune, VICTOR HUGO
Per amica silentia lunae
Virgile
«La lune était sereine et jouait sur les flots. —
La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise,
La sultane regarde, et la mer qui se brise,
Là-bas, d’un flot d’argent brode les noirs îlots.
De ses doigts en vibrant s’échappe la guitare.
Elle écoute… Un bruit sourd frappe les sourds échos.
Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos,
Battant l’archipel grec de sa rame tartare ?
Sont-ce des cormorans qui plongent tour à tour,
Et coupent l’eau, qui roule en perles sur leur aile ?
Est-ce un djinn qui là-haut siffle d’une voix grêle,
Et jette dans la mer les créneaux de la tour ?
Qui trouble ainsi les flots près du sérail des femmes ? —
Ni le noir cormoran, sur la vague bercé,
Ni les pierres du mur, ni le bruit cadencé
Du lourd vaisseau, rampant sur l’onde avec des rames.
Ce sont des sacs pesants, d’où partent des sanglots.
On verrait, en sondant la mer qui les promène,
Se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine… —
La lune était sereine et jouait sur les flots.
(Hugo, Victor, «Clair de lune», Les rayons et les ombres, Paris, Gallimard, 1970 [1840]
6.- Il était une fois (Thierry Lorho)
«D’anciennes légendes nous racontent qu’un jour
La déesse des songes pleura de bonheur
Une larme glissa de ses yeux de velours
Et fut emportée par des anges-créateurs
Pour en faire un joyau ces faiseurs d’univers
Sculptèrent cette perle ainsi la Lune est née
Et chaque soir s’étend sur la voisine terre
La divine lueur de la grâce beauté
Agenouillé et humble j’ai levé les yeux
Un intense moment d’adoration totale
J’ai prié élevant mon âme vers les cieux
Le monde se révèle à la lumière pâle
De la magie lunaire ma muse adorée
Ma plus fidèle amie ma plus fidèle alliée»
7.-La lune blanche (Paul Verlaine)
“La lune blanche
Luit dans les bois;
De chaque branche
Part une voix
Sous la ramée…
O bien aimée.
L’étang reflète
Profond miroir,
La silhouette
Du saule noir
Où le vent pleure…
Rêvons, c’est l’heure.
Un vaste et tendre
Apaisement
Semble descendre
Du firmament
Que l’astre irise…
C’est l’heure exquise”.
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Bonne nuit de pleine lune
P.S. Les images sont de Loui JOVER